Des Soudanais déplacés à Tawila, au Darfour, après avoir fui le camp de Zamzam, près d'el-Facher, le 13 avril 2025 ( AFP / - )
Les paramilitaires soudanais ont affirmé dimanche avoir pris le contrôle de la ville d'el-Facher, après s'être emparés du quartier général de l'armée dans la dernière grande ville du Darfour qui leur échappait encore, l'ONU demandant un passage sûr pour les civils piégés.
Les Forces de soutien rapide (FSR) "annoncent avec fierté avoir pris le contrôle de la ville d'el-Facher", chef-lieu du Darfour-Nord, affirme un communiqué officiel diffusé sur leur chaîne Telegram.
L'armée n'a pas réagi, mais le comité de résistance populaire, un regroupement civil allié de l'armée, a démenti que la prise du quartier général signifie la chute de cette ville de l'ouest du Soudan.
La population d'el-Facher "résiste face aux milices", selon le groupe, qui évoque une "phase importante et critique" des combats après 18 mois de siège.
A défaut d'accès à el-Facher et avec un réseau de télécommunications défaillant, l'AFP ne peut vérifier la situation sur le terrain.
Le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher, a demandé dimanche un passage sûr pour les civils piégés à el-Facher, au Soudan, après que les paramilitaires des Forces de soutien rapide ont annoncé avoir pris le contrôle total de cette ville du Darfour.
"Avec les combattants avançant davantage dans la ville et les voies d'évacuation coupées, des centaines de milliers de civils sont piégés et terrifiés - bombardés, affamés, et sans accès à la nourriture, aux soins ou à la sécurité", a déploré M. Fletcher dans un communiqué.
"Les civils doivent pouvoir circuler en toute sécurité et accéder à l'aide", a-t-il fait valoir. "Ceux qui fuient vers des zones plus sûres doivent pouvoir le faire en toute sécurité et dans la dignité."
- Scènes de joie -
Les FSR ont revendiqué dimanche matin la prise du quartier général avec à l'appui une série de vidéos - des images à l'intérieur du quartier général et des scènes de célébration dans d'autres villes du pays.
Selon le comité de résistance local, un des collectifs civils qui documentent les exactions liées au conflit, les combats se poursuivent et les FSR ont pénétré dans "des bâtiments vides, sans importance" abandonnés par l'armée pour d'autres positions.
Ces derniers mois, el-Facher est devenu l'un des fronts les plus disputés du conflit qui oppose depuis avril 2023 l'armée dirigée par le général Abdel Fattah al-Burhane et les paramilitaires conduits par son ancien allié le général Mohamed Daglo.
Le conflit a fait des dizaines de milliers de morts, déplacé des millions de personnes et provoqué ce que l'ONU qualifie de "pire crise humanitaire" au monde.
Les FSR ont intensifié depuis août les tirs d'artillerie et les attaques de drones, grignotant progressivement les positions de l'armée et prenant le contrôle de plusieurs quartiers.
La prise de la ville, si elle se confirme, représenterait un tournant majeur dans la guerre, confortant les positions des FSR dans la vaste région du Darfour où les paramilitaires contrôlent déjà quatre capitales régionales et certaines parties du sud, avec leurs alliés.
Selon l'ONU, 260.000 civils, dont la moitié sont des enfants, sont dépourvus de nourriture, d'eau et de soins à el-Facher.
Plus d'un million de personnes ont fui la ville depuis le début de la guerre.
Dimanche, l'émissaire américain pour l'Afrique, Massad Boulos, a appelé les FSR à ouvrir "des corridors humanitaires" afin de permettre aux civils d'évacuer.
Plus tôt, les paramilitaires s'étaient engagés dans un communiqué à mettre à disposition "des corridors sécurisés pour tous ceux qui souhaitent se déplacer vers d'autres endroits, ainsi que la fourniture de la protection nécessaire à tous ceux qui se trouvent dans la ville".
- Pourparlers -
"Les FSR cherchent à obtenir un contrôle souverain sur un territoire afin de renforcer leurs revendications en tant que gouvernement", a expliqué à l'AFP Cameron Hudson, expert du Centre d'études stratégiques et internationales.
"Un contrôle total sur le Darfour sert cette ambition" et de ce fait la prise de la ville "revêt une portée politique profonde", selon l'expert basé à Washington.
De son côté, l'armée conserve le nord, l'est et le centre du pays.
Le Soudan, déjà amputé du Sud en 2011, risque à terme de se fragmenter, selon les experts. Et malgré des efforts internationaux pour un cessez-le-feu, les deux camps, tous deux accusés d'exactions sur les civils, restent sourds aux appels à négocier.
Vendredi, de nouveaux pourparlers de paix se sont tenus à Washington entre les Etats-Unis, l'Arabie saoudite, l'Egypte et les Emirats arabes unis.
Ce groupe de médiateurs, connu sous le nom de "Quad", a appelé à "faire avancer les efforts collectifs vers la paix et la stabilité au Soudan" et une transition vers un régime civil, selon Massad Boulos.
Les quatre pays ont également réitéré une proposition formulée en septembre et aussitôt rejetée par le gouvernement soudanais formé par l'armée.
Cette proposition prévoit une trêve humanitaire de trois mois, un cessez-le-feu permanent et une transition de neuf mois vers un gouvernement civil, et notamment l'exclusion du gouvernement actuel et des FSR du paysage politique post-conflit.

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